Boubacar Boris DIOP
Voir aussi la liste des écrivains sénégalais dans la page littérature
Né le 26 octobre 1946 à Dakar. Conseiller technique au ministère de la Culture, professeur de littérature, puis de philosophie pendant une dizaine d'années. Actuellement journaliste, il collabore à différents journaux dans son pays, ainsi qu'au quotidien zurichois "Neue Zucker Zeitung" (depuis 1991) et au mensuel africain d'analyses édité à paris : "Afrique, perspectives et réalités". Il fut aussi le directeur du Matin de Dakar.
Boubacar Boris Diop est aussi l'auteur de trois pièces de théâtre. Il a également travaillé pour le cinéma comme scénariste.
A 57 ans, le Sénégalais Boubacar Boris Diop s'est imposé comme un des écrivains majeurs de l'Afrique francophone contemporaine. Discret, grand lecteur et esprit curieux, ce Sénégalais est présent sur tous les fronts lorsqu'il s'agit de défendre les cultures africaines, de trouver un juste milieu entre la langue française et les langues africaines. Il est bien placé pour cela : vivant en Afrique, mais souvent présent en France où il publie, il passe sans complexe de l'écriture en langue française à l'écriture en wolof. Conscient d'employer une langue française qui ne pourrait parfois pas mieux exprimer ce qu'il voudrait dire, il ne la repousse pas pour autant, convaincu que toutes les langues peuvent coexister et que l'écrivain a plutôt intérêt à en maîtriser le plus grand nombre afin d'élargir son univers de création.
Romans
Le Temps de Tamango,
1981, (Prix du bureau sénégalais du droit
d'auteur) : Au XXIème siècle, des
intellectuels africains tentent une reconstitution des
événements des années 1970. A travers
ce roman de politique-fiction, Boubacar Boris Diop,
jeune auteur sénégalais, fait un bilan
des vingt premières années de l'Indépendance.
La multiplicité des temps et des points de vue
narratifs nous offrent cette vision à facettes
d'une société en décomposition.
Une critique habile d'une pernicieuse domination, culturelle
et linguistique, à la façon des romanciers
sud-américains...
Les Tambours de
la mémoire, 1991, coll. Encres noires
(Grand prix de la République du Sénégal
pour les lettres) : La reine Johanna Simentho du royaume
de Wissombo. Fiction ou réalité ? Qu'importe
puisque sa magie existe. Puisqu'elle porte le souffle
de l'indépendance de la liberté et de
la dignité. Fadel, le fils du milliardaire, le
croît ; il quittera tout pour la servir. Son frère,
Badou, le révolutionnaire, fredonnera, sans illusion,
le chant de Johanna. Quant à Ismaïlia, jeune
bureaucrate, et Ndella, sa femme, la mystérieuse
disparition de Fadel les entraînera, eux aussi
dans le sillage de la reine Johanna, point focal de
l'histoire. Pour tous, l'écho des tambours de
la mémoire résonnera porté par
le vent de l'Histoire.
Le Cavalier et son
ombre, Paris, Stock, 1997 (Prix Tropiques)
: C'est le pénible parcours de cet Orphée des temps
modernes que le romancier sénégalais Boubacar Boris
Diop retrace dans son quatrième roman. Peu à peu, se
dessine le portrait de Khadidja, cette femme énigme
qui s'est dérobée à l'amour du narrateur "comme
on disparaît dans des sables mouvants". Ecrit par
petites vagues sèches, "Le cavalier et son ombre"
est un roman fascinant, mystérieux et quotidien. Boubacar
Boris Diop cerne au plus près la montée de l'angoisse
chez son héros, les ravages qu'exerce sur son esprit
cette douleur sourde qui mine plus sûrement que le désespoir
: l'incertitude.
Murambi, le livre
des ossements, 2000 : Un « livre des
ossements » pour dénoncer le génocide
rwandais.
L'impossible
innocence, 2004 : Dans un pays d'Afrique noire
en proie à la guerre civile, des factions armées
font régner leur loi. Pour échapper à
cette folie meurtrière, un homme se cache quelque
part dans la banlieue de Ndunga, la capitale. Moussa
Ndour n'est pas n'importe qui. C'est le tyran chassé
de son palais quelques jours plus tôt. En prévision
de sa chute, il avait fait construire clandestinement
un immense bunker. Des heures difficiles s'annoncent
pour celui qui, pendant de longues années de
règne, s'est montré particulièrement
cruel.
Juste au-dessus de ce bunker, se trouvait l'atelier
d'une jeune artiste-peintre, Binta Ndombo. Au temps
de sa splendeur, le tyran venait l'y rencontrer en secret.
Etait-elle sa maîtresse ? Il semble bien que non.
Leur énigmatique liaison s'était bâtie
autour du cadavre de Judith Ndombo, fillette de huit
ans, violée et affreusement mutilée quelques
années plus tôt. La petite soeur de l'artiste.
Celle-ci, comme tout le monde, est convaincue que Moussa
Ndour a commis ce meurtre.
L'homme est prêt à endosser tous les crimes
dont on l'accuse, sauf celui-là. Comment convaincre
la jeune femme de son innocence ? Bien qu'elle soit
loin de lui, parmi les longues colonnes de réfugiés
se ruant vers les frontières, il décide
de lui écrire une dernière lettre. Lui
parviendra-t-elle jamais ? Ce sera une lettre d'adieu,
car il sait que ses jours à lui sont comptés.
Ce sera surtout une confession.
Kaveena,
2006: Un pays d'Afrique noire, au lendemain d'une guerre
civile. Lorsque le colonel Asante Kroma, chef de la
police et narrateur du roman, entre dans une petite
maison de la banlieue de la capitale, à Jinkoré,
il fait une découverte considérable :
devant lui, vient de mourir le chef d'État en
fuite, le président N'Fa Tandine qui a été
renversé depuis plusieurs semaines, et que tout
le monde recherche.
En prévision de sa chute, Tandine avait fait
construire clandestinement un bunker sous l'atelier
d'une jeune artiste-peintre, Mumbi Awele, qu'il venait,
au temps de sa splendeur, rencontrer en secret. Était-elle
sa maîtresse ? Une prostituée ? Leur liaison
s'était bâtie autour du cadavre de Wangari,
fillette de huit ans, violée et affreusement
mutilée quelques années plus tôt.
La fille de Mumbi. Celle-ci a toujours pensé
que son amant, le président, en était
l'assassin.
Le colonel Kroma va décider de vivre quelques
jours dans ce lieu étouffant où se décompose
le corps de l'ex-tyran, et se gardera bien d'annoncer
cette nouvelle aux autorités, dirigées
en apparence par le nouveau président MMwanke,
mais en réalité par le Français
Pierre Castaneda, ministre d'État et patron de
la société minière, Cogemin, qui
exploite les ressources du pays. Castaneda qui, après
avoir été comme un frère pour le
président déchu, a voulu s'approprier
le pouvoir et les richesses.
Kroma fera de nombreuses découvertes dans le
bunker, notamment des textes écrits par Tandine
à Mumbi pour lui expliquer la vérité,
vérité que le chef de la police croisera
avec les très nombreuses informations qu'il détient
de par ses fonctions, et, peu à peu, dans son
esprit, au coeur de ce souterrain, se recomposera l'incroyable
histoire de Tandine, Castaneda et Mumbi. Et la vérité
sur le meurtre de la petite Wangari.
Porté par une écriture dépouillée
mais puissante, Les chiens du crépuscule explore
les grands maux dont souffre l'Afrique, au premier rang
desquels l'exploitation par les ex-métropoles
coloniales et les appétits sans fin de dirigeants
violents. Une Afrique symbolisée ici par le magnifique
personnage de Mumbi, femme généreuse et
intelligente, qui est contrainte d'offrir son corps
à un homme dominateur et avide. Tout en conservant
une très belle dignité.
Théâtre
Thiaroye, terre
rouge,1990
Essais politique
Négrophobie,
réponse aux "Négrologues",
journalistes françafricains et autres falsificateurs
de l'information, avec Odile Tobner et François-Xavier
Verschave Les arènes, 2005
L'Afrique au-delà
du miroir, 2007 : « Le champ littéraire
africain francophone se réduit presque toujours
aux seuls textes de fiction. Est-ce dû à
l'extrême jeunesse d'une littérature
née seulement en 1926, avec le roman Force-Bonté
de Bakary Diallo ? Ou à la quasi impossibilité
pour un auteur africain de s'enfermer dans un
Je purement individualiste ? Quelle qu'en soit
la cause, le phénomène est frappant :
notre littérature est dépourvue de ces
« pourtours » que sont, pour ses homologues
plus anciennes, les correspondances entre écrivains,
les journaux intimes, les mémoires et les essais
ou confessions. On sait souvent peu de choses sur le
rapport du romancier à la réalité,
aux mécanismes de sa fiction. Il est interpellé
par des critiques surtout soucieux de lui faire confirmer
leur lecture, bien étrange parfois, de son travail.
Il répond à leurs questions avec beaucoup
de bonne volonté, quitte du reste à se
contredire d'une interview à une autre.
On peut résumer cette situation en disant que
quelqu'un parle toujours à la place de l'auteur
africain et lui enjoint avec une hautaine sévérité
: "Écris et... tais-toi !" Et s'il
est pourtant un auteur de notre temps qui devrait s'autoriser
à prendre la parole, voire à hurler sa
révolte, c'est bien lui. D'abord
en raison des attentes énormes que suscite son
statut de raconteur d'histoires. On ne se rend
pas compte hors d'Afrique à quel point
le chaos africain trouble les esprits. Dans une situation
complexe et propice à tous les mensonges, chacun
espère de l'écrivain des paroles
fortes et claires.». Pendant un quart de siècle
de présence active sur le champ littéraire
africain, Boubacar Boris Diop a engrangé une
expérience propre à nourrir sa réflexion
qu'il expose avec beaucoup de conviction dans cet ouvrage.
Il évoque tour à tour : la langue de l'auteur
africain et les dynamiques littéraires africaines
dans les espaces arabophones, anglophones, lusophones
et francophones. Il prolonge la réflexion par
un compte-rendu personnel du Salon du Livre 2006, consacré
à la francophonie, où il était
invité. Les grandes options culturelles pour
l'Afrique au lendemain de la décolonisation.
Il choisit pour les illustrer les deux grandes figures
sénégalaises de Cheikh Anta Diop et de
Léopold Sedar Senghor. La politique contemporaine
autour du problème majeur du rapport des intellectuels
africains avec la question du génocide des Tutsis
du Rwanda. Il sera aussi question de la soudaine résurgence,
dans la diaspora noire, des débats sur la Traite
négrière et sur la colonisation. Puis,
à la faveur des événements de Ceuta
et Melilla et du vote de la loi Sarkozy sur l'
« immigration choisie », un tout dernier
texte sera intitulé Les damnés de la mer.
Voir aussi la liste des écrivains sénégalais dans la page littérature